Saint-Denis, Saint-Denis - Portail du bras nord du transept dit « des Valois » : le martyre de saint Denis, entouré de figures de rois

Localisation

Ville

Département

Pays

Nom de l'édifice

Saint-Denis

Type d'édifice

Emplacement de l'œuvre

Extérieur

Emplacement précis de l'œuvre

Bras nord du transept

Localisation de l'œuvre

Portail dit « des Valois »

Coordonnées géographiques

48.93581, 2.36045

Auteur et donateur

Description et Iconographie

Description

Un quatrième portail [outre les trois portails occidentaux] peut être attribué à l'initiative de Suger, datable en fonction de son style de la fin de son abbatiat, entre l'achèvement du chevet en 1144 et sa mort en 1151.
L'emplacement définitif de ce quatrième portail, inséré dans le mur pignon du bras nord du transept rayonnant par l'architecte chargé de la réédification de l'abbatiale à partir de 1231, laisse supposer qu'il a été simplement reporté de quelques mètres vers le nord. […]
Le remploi du portail tout entier dans le deuxième quart du XIIIe siècle ne lui a valu que des aménagements mineurs, principalement sa surélévation et l'ajout (tardif) d'un trumeau dont le style est datable des années 1270 en fonction des drapés de la Vierge à l'Enfant qu'il porte, toujours en place mais très restaurée au XIXe siècle, et des prophètes sculptés en moyen relief dans les niches du piédestal, dont l'original est conservé au Louvre.
Les dégradations révolutionnaires ont plus sûrement modifié son aspect. Les têtes de toutes les figures de rois sont alors décollées ; Alexandre Lenoir en recueille peut-être une partie pour son musée des Monuments français où elles rejoignent les corps étêtés des six statues-colonnes. L'ensemble de ces vestiges est renvoyé à Saint-Denis en 1816 et fait l'objet d'un long et patient travail de réinsertion, sous la conduite de François Debret, par les sculpteurs Germain (de 1817 à 1829) et Blois (de 1820 à 1843). Les parties manquantes des rois des ébrasements sont reconstituées au moyen de greffes habiles et les têtes originales remises en place. Dans les voussures, au tympan et au linteau, les personnages dont la tête a disparu en reçoivent une nouvelle, inventée selon la libre inspiration des sculpteurs, tandis qu'un lot de cinq têtes provenant des voussures et non remployées passe finalement au Louvre. Quant à la Vierge au trumeau, complétée à la demande de Debret en 1842-1844, elle est dérestaurée et reprise sur l'instruction de Viollet-le-Duc en 1870-1872. Le nettoyage du portail en 1996 a permis d'apprécier sur des bases sûres l'étendue des interventions du XIXe siècle. Françoise Baron a complété les observations faites à cette occasion par une étude minutieuse des sources.
SOURCE : Berné Damien, Le décor sculpté de l'œuvre de Suger, in « Saint-Denis : dans l'éternité des rois et reines de France », dir. sc. Jean-Paul Deremble, Brigitte Lainé et Michaël Wyss, Strasbourg/Paris, La Nuée bleue/Place des Victoires, coll. « La Grâce d'une cathédrale », 2015, p. 175-191.
C'est l'abbé Eudes Clément (1229-1245) qui décida de rouvrir le chantier. La chronique du monastère place l'événement en 1231, dans les toutes premières années du nouvel abbatiat : c'est dire l'importance que l'abbé attachait à cette décision. En effet, le projet était d'envergure. Il ne s'agissait rien moins que de rebâtir le chevet de l'abbé Suger, puis de jeter à bas ce qui subsistait de l'abbatiale carolingienne, pour relier la nouvelle construction à la façade qui avait été terminée en 1140. […] D'après les recherches de Caroline Bruzelius, la construction a été menée en six campagnes. […] Les travaux se poursuivront d'abord du côté nord, avec la construction du bras du transept. Celle-ci, commencée par l'est, fut terminée dans une deuxième étape du chantier […]. Engagé en 1231, le chantier avança rapidement. En 1237 on pouvait procéder au transfert des reliques de saint Hyppolite dans le bras nord du transept. Une série de chartes données par Eudes Clément en 1241 laisse penser que les deux premières étapes des travaux étaient terminées à cette date.
SOURCE : Gallet Yves, Le chantier gothique rayonnant, in « Saint-Denis : dans l'éternité des rois et reines de France », dir. sc. Jean-Paul Deremble, Brigitte Lainé et Michaël Wyss, Strasbourg/Paris, La Nuée bleue/Place des Victoires, coll. « La Grâce d'une cathédrale », 2015, p. 73-93.
1818 : Debret fait restaurer par Germain et ses collaborateurs Pioche, Thiébault et Guiebert les figures provenant de la porte de Valois, alors de retour du musée de Lenoir, mais aussi une grande partie des sculptures de cette porte. En 1822-1823, Germain continue à travailler à la sculpture de la porte.
SOURCE : Leniaud Jean-Michel, « La Basilique royale de Saint-Denis : de Napoléon à la République », Paris, Picard, 2012.

Technique artistique

Architecture
Sculpture

Cycle iconographique

Iconographie/Bibliographie

Sauerländer Willibald, La Sculpture gothique en France, 1140-1270, Paris, Flammarion, 1972 (ici p. 90-91)
Brown Elizabeth A. R., Saint-Denis. La basilique, trad. Divina Cabo, Saint-Léger-Vauban, Zodiaque, 2001 (portail des Valois, p. 131-161)
Berné Damien et Plagnieux Philippe, Le portail des Valois ou la remise en question du modèle chartrain, in Naissance de la sculpture gothique. Saint-Denis, Paris, Chartres, 1135-1150 [cat. expo., musée de Cluny, octobre-décembre 2018], dir. D. Berné et Ph. Plagnieux, Paris, Éditions RMN-Grand Palais, 2018, p. 227-240.

Iconographie/Description

Au trumeau, la Vierge à l'Enfant. Dans les ébrasements, de chaque côté, trois rois, et dans les voussures, trente rois et Jésus Christ, témoins des souffrances des martyrs représentés au tympan : saint Denis, saint Rustique et saint Éleuthère. Quelle est l'identité des trente-six rois du portail ? On les a identifiés avec des rois de l'Ancien Testament ; on y a vu aussi un arbre de Jessé monumental, qui représenterait les ancêtres royaux du Christ. Mais l'on peut se demander si les trente-six statues ne représentent pas plutôt les rois de France et les trois dynasties ayant régné sur le royaume de France depuis sa fondation légendaire par des réfugiés troyens [Brown] =
Trente-six rois entourent le martyre de saint Denis. La question se pose de savoir si ce programme représente les souverains français en vassaux de saint Denis. Impossible d'en décider en l'absence de documents [Sauerländer] =
Sur ce second portail consacré au saint patron de l'abbaye, les rois de l'Ancien Testament sont encore davantage présents : les trois rangs de voussures abritent une trentaine de rois, auxquels s'ajoutent les six grandes figures couronnées des ébrasements. […] Suger soutenait l'idée selon laquelle on devait, du fait du sacre, assimiler les rois de France aux rois de l'Ancien Testament. Le tympan et le linteau sont entièrement consacrés au martyre de saint Denis et de ses compagnons [Berné et Plagnieux].

Notes

Notes

L'iconographie de ses voussures et de ses statues-colonnes en fait un portail royal ; mais sa position à proximité de la rotonde funéraire des Valois, édifiée contre le bras nord du transept dans le troisième quart du XVIe siècle, est à l'origine de son nom d'usage de « portail des Valois ».
SOURCE : Berné, art. cit.
Ce portail est une œuvre du XIIe siècle, remployée dans l'actuel pignon du bras nord du transept du XIIIe siècle. […]
L'archéologie offre aujourd'hui la possibilité d'étudier la question de l'emplacement originel de ce portail, qui est étroitement lié au développement architectural de la basilique carolingienne. Primitivement, cet édifice comportait deux portails latéraux percés à l'extrémité orientale des bas-côtés. […] Vers 1145, Suger s'apprêta à englober la nef carolingienne dans son projet d'agrandissement. Les fouilles de Sumner McKnight Crosby ont mis au jour les murs des deux bas-côtés élargis, mais ont également apporté la preuve que ceux de la basilique carolingienne étaient restés debout jusqu'au moment de la reconstruction de la nef gothique. Suger n'a donc pas eu le temps d'achever cette dernière campagne. Or, comme aucun de ces deux murs restés en chantier ne comporte de passage à l'emplacement des anciennes portes latérales, leurs ouvertures furent sans doute condamnées. En revanche, du côté du cloître, Crosby a découvert un nouveau portail ménagé dans le pignon sud du transept carolingien. Cette double porte est elle aussi restée inachevée, mais elle suggère fortement qu'un passage en vis-à-vis fut percé dans le bras nord du transept. C'est à son emplacement, non encore reconnu en fouille, que dut être installé le portail primitif, adossé au mur de faible épaisseur du pignon carolingien. De ce fait, l'architecte des années 1240 ne dut guère rencontrer de difficultés pour déposer et transporter ce portail au droit du nouveau pignon implanté 6 mètres plus au nord.
Lors de son remontage, il a été surélevé d'un demi-mètre par l'insertion d'un soubassement formant banc. Au-dessus, les statues-colonnes et les piédroits furent complétés par deux murs d'ébrasement dont l'alternance d'angles rentrants et de colonnettes engagées respecte fidèlement le profil en plan des bases et des chapiteaux d'origine. Toutefois, l'épaisseur du nouveau mur pignon excédant la profondeur du portail, il fut nécessaire de compléter ses ébrasements par l'ajout, à l'extérieur, de deux colonnettes se prolongeant au-dessus des chapiteaux par une voussure moulurée garnie à l'extrados d'un larmier retombant sur deux têtes léonines, dont le style se rattache au courant du XIIIe siècle. Un autre remaniement a modifié l'appareillage de l'archivolte. Il pourrait s'expliquer par la perte, lors du transfert, de certains éléments qui se trouvaient intercalés entre le tympan et la voussure intérieure. Ainsi, au sommet des voussures, plusieurs claveaux ont été raccourcis par la retaille de leurs lits de joint obliques entraînant, dans la voussure intérieure, la mutilation de la sculpture d'un roi et celle du Christ bénissant. Enfin, c'est probablement pour remédier à un désordre survenu dans un second temps que le portail est doté, vers 1260-1270, d'un trumeau orné d'une statue de la Vierge à l'Enfant. De toutes ces observations, il résulte que la récupération du portail s'est limitée principalement aux parties sculptées et que sa nouvelle configuration a respecté la disposition d'origine. […]
Déplacé de son lieu d'origine, [le portail] a de plus été très malmené au cours de son existence. Sa profusion de têtes couronnées n'a pas dû échapper aux révolutionnaires. En témoigne un dessin de Charles Percier qui, en 1794-1795, le représente sans ses statues-colonnes et avec des figures d'archivolte décapitées. Or, Percier travaillait pour Alexandre Lenoir qui, envisageant le transport du portail au musée des Monuments français à Paris, avait fait enlever de Saint-Denis les statues-colonnes et plusieurs têtes. Le projet de transfert n'ayant finalement pas abouti, les vestiges furent rapportés à Saint-Denis, en 1816.
Ouvrant sur le vieux cimetière des Valois, là où en 1817 on procéda à l'exhumation solennelle des ossements des sépultures royales profanées en 1793, le portail attire aussitôt l'attention de l'architecte François Debret, qui engage ainsi sa toute première restauration de portail sculpté à Saint-Denis. La première campagne, menée par les deux sculpteurs Germain et Blois, dure vingt-six ans (de 1818 à 1844) avec toutefois des interruptions. Elle comprend la remise en place des statues-colonnes et le rétablissement du décor sculpté. En 1870, Eugène Viollet-le-Duc demande au sculpteur Louis Villeminot de reprendre la restauration du trumeau.
SOURCE : Wyss Michaël, Le portail dit « des Valois », in « Naissance de la sculpture gothique. Saint-Denis, Paris, Chartres, 1135-1150 » [cat. expo., musée de Cluny, octobre-décembre 2018], dir. Damien Berné et Philippe Plagnieux, Paris, Éditions RMN-Grand Palais, 2018, p. 220-222.
La contribution de Pierre de Montreuil - C'est dans ce cadre chronologique qu'apparaît le célèbre Pierre de Montreuil, qui, présenté comme « maçon de Saint-Denis » (« cementarius de Sancto Dionysio »), se porte acquéreur en 1247 d'une carrière à Conflans. On sait que Pierre de Montreuil (1212-1267) a eu à Paris une carrière prestigieuse, commencée à Saint-Germain-des-Prés en 1239, achevée comme maître des œuvres de la cathédrale Notre-Dame autour de 1265, mais la mention de 1247 a été interprétée de façon divergente. Depuis la découverte de ce texte par Henri Stein en 1902, la tradition historiographique y reconnaît le nom du maître d'œuvre responsable du chantier de l'abbatiale à cette date. Robert Branner, pour sa part, a fait remarquer que la titulature donnée à Pierre de Montreuil n'impliquait pas qu'il ait été à la tête du chantier. Les historiens français, Pierre Grodecki en tête, ont contesté cette lecture et rétabli Pierre de Montreuil comme successeur du Maître de Saint-Denis, arguant de ce qu'une carrière aussi prestigieuse, entrecoupée par des fonctions subalternes à Saint-Denis, était assez improbable. Caroline Bruzelius, plus circonspecte, a constaté que la date de 1247 correspondait à une baisse de régime des travaux, et a proposé de laisser ouverte la question de la participation de Pierre de Montreuil au chantier. En dernier lieu, il a été suggéré que l'expression « maçon de Saint-Denis » désignait simplement la profession et le lieu de résidence de Pierre de Montreuil, sans impliquer qu'il ait pris la moindre part aux travaux de l'abbatiale. Cette interprétation est sans doute trop radicale. Le fait qu'un architecte auparavant actif à Saint-Germain-des-Prés ait disposé à Saint-Denis d'une maison qu'un texte plus tardif permet en outre de situer place Pannetière, c'est-à-dire en face de l'abbatiale, est un indice fort en faveur d'une activité requérant sa présence sur place. Quant à l'argument d'une baisse d'intensité du chantier au milieu des années 1240, il peut être nuancé car d'autres bâtiments que l'abbatiale ont pu être en travaux.
Un autre indice porte à croire à des liens entre Pierre de Montreuil et l'abbaye : depuis 1284 au moins, son parent Eudes de Montreuil fut rémunéré pour des travaux au service de Saint-Denis, à l'abbatiale même (il reçut des sommes importantes, en 1284 ou 1287 pour sa collaboration au jubé), dans des dépendances de l'abbaye comme le manoir de Merville, ou dans certains édifices que le monastère possédait à Paris, tel le collège de Saint-Denis, près de Saint-Germain-des-Prés. À partir de 1289 et jusqu'en 1296, c'est le nom de Raoul de Montreuil, fils d'Eudes, qui apparaît à plusieurs reprises dans les comptes de la Commanderie de Saint-Denis : rétribué de façon régulière et confortable, avec quelques extras, Raoul semble avoir recueilli la position de son père, décédé en 1289. L'idée d'une dynastie, qui s'impose logiquement, donne du poids à l'hypothèse suivant laquelle Pierre de Montreuil lui-même aurait pu tenir une charge similaire.
SOURCE : Gallet Yves, Le chantier gothique rayonnant, in « Saint-Denis : dans l'éternité des rois et reines de France », dir. sc. Jean-Paul Deremble, Brigitte Lainé et Michaël Wyss, Strasbourg/Paris, La Nuée bleue/Place des Victoires, coll. « La Grâce d'une cathédrale », 2015, p. 73-93.

Création de la fiche

Auteur de la fiche

Date de création

2013-09-29

Privé, données de gestion

Type de document

Objet physique : Œuvre

Origine

SC_OEU_9986

Identifiant

359986

Code œuvre dans Access

TN(portail)

Langue

fr

Date de la numérisation

2020-08-20